Bien qu'elle fleurisse en France et en Italie à partir de 1943, la tactique de la guérilla – celle des partisans et des maquisards – se développe surtout dans les Balkans et en Europe orientale, où les méthodes d'occupation sont infiniment plus brutales qu'à l'Ouest. En Pologne se constitue, sous le nom d'Armée de l'intérieur, et en liaison avec le gouvernement en exil à Londres, une armée secrète qui lancera le 1er août 1944 l'insurrection de Varsovie. En Yougoslavie, de véritables batailles rangées opposent les partisans de Tito aux divisions allemandes. En Grèce, des guérillas communistes rivalisent avec les guérillas royalistes soutenues par les Britanniques du SOE; il leur arrive cependant de collaborer, comme dans l'opération célèbre contre le viaduc enjambant le Gorgopotamos, non loin des Thermopyles, sur lequel passe l'unique voie ferrée reliant Salonique au Pirée (d'où est embarqué le matériel destiné à l'Afrikakorps du maréchal Rommel): la coopération des deux principaux chefs de la Résistance grecque – le colonel Zervas de l'Armée secrète et le communiste Veloukhiotis – et d'un commando britannique parachuté d'Égypte permet, le 26 novembre 1942, de faire sauter le viaduc, interrompant le trafic du chemin de fer pendant trente-neuf jours. En URSS, dès juillet 1941, Staline lance un appel à la radio qui donne l'ordre d'organiser des unités de partisans dans les territoires envahis, de faire sauter ponts et nœuds de communications, de couper les lignes téléphoniques, de mettre le feu aux entrepôts; en vérité, ces actions ne prennent de la consistance qu'après 1942. Les partisans soviétiques restent étroitement liés à l'Armée rouge et intégrés à sa stratégie.

La bataille des ondes Messages codés diffusés par la BBC pendant l'Occupation (1944) Chronologie (1940)

La radio a été une arme à part entière du combat contre l'Axe. En effet, le moral des peuples occupés, livrés à l'oppressante propagande de l'ennemi, avait besoin d'être constamment soutenu, et leur volonté de lutte aiguillonnée. Aussi la TSF devint-elle dès le début un outil capital de la guerre psychologique. La BBC fut la plus écoutée des stations alliées, Radio-Moscou (qui possédait l'émetteur le plus puissant du monde et qui avait la plus longue expérience de propagande par les ondes) n'étant captée que dans les pays de l'Est et écoutée que par les communistes. Les programmes diffusés par la Suisse, pays neutre, étaient assez recherchés en raison de leur réputation d'objectivité. Malgré les efforts acharnés des occupants pour brouiller les émissions de Londres, la BBC, qui diffusait dans toutes les langues et s'adressait à chacun des pays européens y compris l'Allemagne et l'Italie, a joué un rôle déterminant: elle a pu transmettre des consignes d'action à la masse de ses auditeurs et envoyer aux mouvements et réseaux de résistance des instructions sous forme d'innombrables messages codés. La BBC a beaucoup servi la Résistance gaulliste, le général de Gaulle – et avec lui la France libre – n'ayant eu pendant longtemps, pour la plupart des Français, d'autre existence que radiophonique.

L'Europe résistante d'est en ouest

Dans tous les pays d'Europe, les résistants sont de plus en plus nombreux et de mieux en mieux organisés, au fur et à mesure du déroulement du conflit.

Le destin tragique de la Résistance polonaise

Après l'écrasement militaire et le partage du pays entre Allemands et Soviétiques, les Polonais endurent pendant cinq ans la plus effroyable des occupations. Réduits à l'état d'esclaves travaillant pour le peuple allemand, chassés et dépossédés de leurs terres et de leurs biens, soumis à une brutale politique de germanisation, ils réagissent en bloc à la volonté nazie de destruction physique des élites nationales.

De 1941 à 1945, la Résistance polonaise se trouve dans une situation très particulière par rapport aux autres pays européens: elle se compose de deux organisations rivales, d'importance inégale par ailleurs. La première, la plus ancienne et la plus puissante, appuyée par l'immense majorité de la population, est tournée vers les Alliés occidentaux et travaille en coordination avec le gouvernement en exil à Londres: c'est cette Armée de l'intérieur (Armia Krajowa) qui déclenche la bataille dramatique de Varsovie le 1er août 1944, férocement réprimée par les Allemands. Alors qu'il semblait que l'Armée rouge pouvait libérer la ville, les troupes soviétiques marquèrent une pause dans leur progression, ce qui sera interprété après la guerre comme une volonté délibérée de laisser massacrer les résistants polonais non communistes. Il est certain que cela profita à l'autre mouvement de résistance, soutenu par l'URSS, qui avait un soutien moindre dans le pays. Ce mouvement, formé de communistes et dirigé par le gouvernement provisoire établi à Lublin dès 1944, finira par éliminer les représentants du gouvernement polonais en exil à Londres.

L'insurrection du ghetto de Varsovie (document Le Monde) Chronologie (1943)

En Pologne se développe également une résistance juive, la plus puissante d'Europe, avec de petits groupes de partisans qui opèrent dans les forêts, aux confins de la Biélorussie et des pays baltes. Mais la grande épopée de cette résistance est l'insurrection du ghetto de Varsovie, où survivent, en avril 1943, environ 70,000 Juifs: le 19, un millier de combattants décidés à «mourir dans l'honneur» se dressent contre les troupes allemandes; ils combattront pendant vingt-six jours avec acharnement, tandis que le ghetto sera incendié et démoli maison par maison.

Résistance et guerre civile en Yougoslavie

Dans les Balkans, la lutte contre l'occupant prend la forme d'actions de guérilla conduites par des francs-tireurs que les Allemands dénoncent comme des «terroristes» et contre lesquels ils exercent une répression féroce. La Yougoslavie offre l'exemple d'une guérilla victorieuse – favorisée, il est vrai, par la topographie: relief montagneux et tourmenté, régions cloisonnées, vastes étendues boisées – et d'une nation occupée libérée en large partie par ses propres forces, mais au prix de pertes terribles et d'une mémoire divisée et sanglante. En effet, dans ce pays envahi par la Wehrmacht et l'armée italienne en avril 1941, trois guerres se déroulent, parfois simultanément: d'abord, une lutte farouche contre les occupants; ensuite, une guerre civile entre communistes et royalistes fidèles au souverain et au gouvernement en exil; enfin, une lutte impitoyable menée par les nationalistes croates (oustachis) contre les Serbes, ces derniers étant les victimes d'une politique d'extermination.

Dès les débuts de l'Occupation, deux groupes distincts de résistants se constituent. D'un côté, le colonel Mihailovic, patriote serbe anti-allemand et anticommuniste, rassemble d'anciens soldats et des paysans volontaires, recrutés essentiellement parmi les Serbes, et les organise en unités de tchetniks. De l'autre, de petites unités de partisans mobiles et pugnaces dirigés par Josip Broz, dit Tito, secrétaire général du parti communiste yougoslave, opèrent en Bosnie, en Dalmatie et en Croatie. Bientôt, ces dernières unités, qui résistent avec succès aux offensives de l'armée allemande, tandis que les troupes de Mihailovic se montrent passives et entretiennent des relations douteuses avec l'adversaire, apparaissent comme le noyau le plus actif et le plus efficace de la résistance, et reçoivent, à partir de 1943, le soutien des Britanniques. Forts de cet appui, ainsi que de leur alliance avec Staline, les partisans communistes s'emparent sans difficulté du pouvoir lors de la libération du pays. En Albanie, Enver Hoxha parvient à créer un Front de libération nationale, qui doit faire face à une répression féroce. Après la chute de Mussolini, l'armée de libération nationale doit affronter les Allemands qu'elle finit par chasser en novembre 1944.

La Résistance dans les États nazi et fasciste

En Allemagne, sitôt la prise du pouvoir par Hitler, une vague de terreur s'était abattue, en Allemagne, sur les adversaires du nouveau régime, en particulier sur les sociaux-démocrates, les communistes et les syndicalistes. Des milliers d'antinazis de toutes origines subirent la déportation dans les premiers camps de concentration, tandis que des milliers d'autres durent émigrer – émigration renforcée bientôt par les persécutions contre les juifs. À l'opposition politique s'ajouta une opposition religieuse dans certains milieux protestants et catholiques, derrière des figures de proue comme celles des pasteurs Niemöller et Bonhoeffer ou de Mgr Lichtenberg.

Une poignée d'étudiants de Munich, groupés dans l'organisation La Rose blanche, tentent, en 1942, de se dresser contre l'idéologie hitlérienne. Mais, vite repérés et arrêtés, ils sont exécutés. Le mouvement d'opposition le plus important, dit «national-conservateur», rassemble des officiers de l'armée qui jugent que Hitler conduit l'Allemagne à sa perte. Pour eux, la seule solution est d'éliminer physiquement le Führer. Mais le complot monté autour du colonel Stauffenberg, en liaison avec des libéraux et des syndicalistes, n'aboutit qu'à un attentat manqué, le 20 juillet 1944: Hitler en sort indemne. C'est à la fois le point culminant et le point final de la Résistance allemande, car la répression se déchaîne ensuite contre tous les opposants, qui sont arrêtés et exécutés par milliers.

En Italie les défaites militaires ont entraîné la chute du fascisme dès 1943 et le passage du pays dans le camp allié. L'Italie est alors coupée en deux: si le Sud est libéré, le centre et le Nord se trouvent sous la double domination des troupes allemandes et du régime néofasciste de Mussolini, installé à Salo, près du lac de Garde. L'antifascisme débouche ainsi sur la Résistance armée, dirigée par le Comité de libération nationale, qui rassemble six partis (notamment les démocrates-chrétiens, les communistes, les socialistes et les libéraux), sous l'autorité de Ferruccio Parri, du communiste Luigi Longo et du général Cadorna.

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